Droit des brevets et projets de R&D

Droit des brevets et développement pharmaceutique

Introduction

De manière générale, il est nécessaire de sécuriser toute activité de développement pharmaceutique innovant via l’adoption d’une stratégie brevet adaptée.

En pratique, selon le projet, et sans que cette liste soit exhaustive, il pourra s’agir de protéger des principes actifs ou des associations de principes actifs, des excipients, des produits finis, des procédés d’obtention, des indications thérapeutiques, des posologies particulières, etc.

La possibilité d’obtention d’un brevet fort et large dans un environnement concurrentiel avec un risque minimisé dépendra de l’art antérieur existant, de l’existence de brevet(s) concurrent(s), ainsi que des ressources allouées à la stratégie brevet.

L’élaboration d’une stratégie brevet peut donc être divisée en deux piliers décisionnels : la brevetabili (protéger son invention) et la liberté d’exploitation (connaître et statuer vis-à-vis de brevets de concurrents susceptibles d’être gênants). Ces deux aspects sont à évaluer de manière indépendante, et ils doivent être chacun pris en compte pour déterminer la situation brevet du projet.

Quatre grandes catégories de situations brevet peuvent ainsi être identifiées, de la plus favorable à la moins favorable :

  • Possibilité de protéger et d’exploiter;
  • Possibilité d’exploiter mais pas de protéger;
  • Possibilité de protéger mais pas d’exploiter;
  • Impossibilité de protéger et d’exploiter.

Ces quatre grandes situations sont représentées sur l’illustration. L’adoption d’une stratégie brevet adaptée permettra, la plupart de temps, d’améliorer la situation, ce qui est représenté par les flèches rouges.

Brevetabilité

Il s’agit ici de déterminer des axes de protection successifs en se positionnant vis-à-vis de l’art antérieur qui aura été préalablement été identifié, tout en prenant en compte les développements futurs anticipables.

Par exemple, le plan de protection peut être défini comme suit : protection d’une nouvelle molécule A, de son procédé de préparation, d’une formulation particulière F comprenant A, d’une utilisation de A en tant que principe actif, d’une ou plusieurs indication(s) thérapeutique(s) liée à l’activité de A, d’une posologie particulière de A dans le cadre de ladite indication thérapeutique.

En pratique, plusieurs demandes de brevet peuvent être déposées, puis étendues dans les zones géographiques d’intérêt : ce processus et les procédures correspondantes seront alors menés durant plusieurs années.

Liberté d’exploitation

Il s’agit ici de connaitre et statuer à propos de brevets de concurrents, en déterminant si ces brevets pourraient être gênants pour l’exploitation.

Si des brevets concurrents sont mis au jour, différentes actions sont alors possibles, par exemple : la contestation de ces brevets, la négociation de licences ou de cessions, voire de partenariats, la poursuite du projet « à risque » après que ce risque a été finement évalué, la mise en place de stratégies de contournement et de modifications du projet sans le vider de sa substantifique moëlle, la poursuite du projet uniquement dans certaines zones géographiques, ou encore l’arrêt total du projet.

Par exemple, en reprenant la situation fictive évoquée ci-dessus, si un brevet concurrent de formulation couvre la formulation F comprenant A, alors il pourra par exemple être opportun de modifier la formulation et d’obtenir une formulation F’ comprenant A libre d’exploitation, d’attaquer le brevet concurrent, ou encore de négocier une licence du brevet concurrent.

Le temps et la connaissance de la situation brevet : des facteurs déterminants

Une stratégie brevet bien élaborée donnant lieu à une connaissance précise de la situation brevet rapidement offrira des opportunités maximales.

À l’inverse, plus la prise de conscience d’une situation brevet défavorable sera tardive, plus les conséquences pourront être lourdes pour le projet. En effet, avec le temps, un grand nombre d’opportunités juridiques et économiques disparaîtront, et la situation brevet s’en trouvera dégradée :

Si l’on considère la problématique de la brevetabilité, disparaîtront progressivement :

– les possibilités d’obtention de protections par brevets de tous les aspects du développement, dès lors que ces aspects auront été divulgués ;

– les possibilités d’obtention de brevets dans toutes les zones géographiques d’intérêt.

Si l’on considère la problématique de la liberté d’exploitation, disparaîtront progressivement :

– les possibilités de contester relativement facilement les demandes de brevet et brevets des concurrents via des procédures administratives simples ;

– les possibilités de contournement des brevets concurrents, devenues trop coûteuses en raison des sommes déjà investies ;

– les possibilités de négociation de licences rapidement avant d’être en position plus défavorable du fait des sommes investies ;

– les possibilités d’arrêt du projet sans grosses pertes économiques.

Pour la mise en place d’une stratégie brevet adaptée, il est ainsi vivement recommandé de faire appel à un Conseil en Propriété Industrielle compétent en Pharmacie, qui saura vous guider utilement dans toutes ces démarches et réflexions.

Michel PELLEGRI

Pharmacien

Conseil en Propriété Industrielle,

Mandataire agréé près l’Office Européen des Brevets

Cabinet Vulpelex

10 Rue Philippe de Lassalle, 69004 Lyon

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