Rencontre avec Jérôme Vander Elst, Digitalisation & Innovation Associate Manager chez Novo Nordisk Chartres - Congrès Polepharma Industrie du Futur les 26 et 27 novembre à Chartres
« Le smart lab : évoluer du simple contrôle au levier stratégique »
Les 26 et 27 novembre 2025, Chartres accueillera la 8e édition du Congrès Polepharma Industrie du Futur, rendez-vous incontournable de la filière (bio)pharmaceutique. Un événement qui illustre la transformation digitale en cours dans l’industrie et son impact concret sur les sites de production de médicaments. Pour Jérôme Vander Elst, Digitalisation & Innovation Associate Manager chez Novo Nordisk Chartres, cette révolution est déjà une réalité et ouvre la voie à des gains importants en termes de performance, qualité et bien-être au travail.

Vous êtes responsable de l’innovation et de la digitalisation chez Novo Nordisk Chartres. En quoi consiste votre mission et pourquoi est-elle stratégique ?
Je pilote depuis trois ans le service innovation et digitalisation du site de Chartres, après dix ans passés dans l’entreprise. Mon équipe œuvre au quotidien à prolonger l’amélioration continue grâce aux nouvelles technologies, là où les outils traditionnels trouvent leurs limites. Nous travaillons sur des projets variés tels que des applications collaboratives, l’impression 3D pour le prototypage, la valorisation de la donnée, ou encore l’intégration de solutions d’intelligence artificielle. Nous avons structuré une équipe pluridisciplinaire de huit experts : développeurs, data scientists, data analysts, ingénieurs en innovation. Tous apportent des compétences issues du numérique, parfois extérieures au monde pharma, pour accompagner cette révolution de l’industrie 4.0. L’objectif est clair : ancrer la digitalisation dans nos processus pour améliorer durablement la performance, renforcer la qualité et soutenir la stratégie globale du groupe.
Novo Nordisk et Polepharma sont partenaires de longue date. Que représente le Congrès Polepharma Industrie du Futur pour vous ?
C’est un rendez-vous incontournable. Novo Nordisk entretient depuis longtemps une relation étroite avec Polepharma, à travers notamment l’implication d’Etienne Tichit, Directeur Général France, engagé dans la feuille de route Décarbonation de la filière et vice-président de l’expertise performance environnementale du cluster. Tout au long de l’année, nos équipes participent aux rencontres, soirées réseaux et groupes de travail, organisés par Polepharma, véritables temps forts pour nourrir les échanges. De plus, le site de Chartres, situé à deux pas du congrès, accueille chaque année un groupe de congressistes pour une visite thématique.
Ce rendez-vous est donc précieux à double titre : il favorise le partage d’expériences entre pairs de l’industrie (bio)pharmaceutique et offre un contact direct avec des fournisseurs et apporteurs de solutions. Il s’agit d’une opportunité unique de faire du benchmark ciblé, plus pertinente que dans des événements plus généralistes, et d’un formidable moteur pour notre dynamique collective !
Vous participez au comité de programmation 2025. Quelles nouveautés cette année ?
Nous avons choisi de consacrer cette édition au laboratoire de contrôle qualité et à l’émergence du smart lab. Ce département, souvent perçu comme annexe, est en réalité stratégique puisqu’il conditionne la libération des lots. Or, il reste encore en retrait en matière de digitalisation.
Cette nouvelle édition entend donc mettre en lumière trois axes majeurs : la valorisation de la donnée, la simplification des opérations et la place centrale de l’humain dans ces transformations. En ouverture du congrès, Stéphane Massé, directeur du contrôle qualité chez Novo Nordisk, partagera l’expérience du site de Chartres autour de la culture Lean appliquée au laboratoire, préalable indispensable avant la digitalisation.
Autre moment fort : la table ronde intitulée « Les robots tombent-ils malades ? » Derrière la formule, une question de fond : comment repenser la complémentarité entre technologies et compétences humaines ? Car si les robots ne prennent effectivement jamais de congés, ils tombent bel et bien en panne. Et leur maintenance repose toujours sur l’expertise humaine. L’enjeu est donc clair : faire en sorte que la technologie s’adapte à l’humain, et non l’inverse. Les compétences humaines restent au cœur de l’équation, garantes d’une appropriation réussie des outils digitaux et de leur pérennité.
Quels enseignements tirez-vous de la digitalisation chez Novo Nordisk Chartres ?
Ces dernières années, Novo Nordisk Chartres a fortement investi pour développer les compétences et les outils nécessaires à sa transformation digitale. L’un des exemples les plus emblématiques est le dossier de lot électronique, qui guide désormais l’opérateur étape par étape. Résultat : moins d’erreurs, une charge documentaire allégée et une nette amélioration de la satisfaction des équipes.
L’expérience a montré que l’adhésion est au rendez-vous dès lors que l’humain est associé dès le départ. Les collaborateurs gagnent du temps sur les tâches à faible valeur ajoutée, qu’ils peuvent réinvestir dans l’amélioration continue. Une application interne permet d’ailleurs à chacun de formuler directement ses propositions, alimentant un cercle vertueux : plus d’outils, plus de temps, plus d’idées d’amélioration.
La digitalisation est désormais intégrée au quotidien et rituels du site, grâce notamment aux écrans qui affichent en temps réel les données de production et aident les opérateurs à prendre les bonnes décisions en fonction des priorités du marché et des indications fournies par nos équipements. L’usine gagne ainsi en réactivité et en agilité.
Le prochain défi sera d’étendre ces solutions aux activités relevant des Bonnes Pratiques de Fabrication (BPF). Pour l’heure, l’absence d’un cadre réglementaire clair, en particulier sur la validation des solutions digitales pour assurer l’intégrité des données et l’audit trail, limite ces initiatives. Mais l’enjeu est de taille : permettre à la digitalisation de s’ancrer jusque dans les processus les plus sensibles de la production pharmaceutique.
Pourquoi ce focus sur le laboratoire d’analyse du futur ?
Parce que c’est l’un des départements les plus riches en données, en équipements et en systèmes comme le LIMS, mais paradoxalement l’un des moins digitalisés. Aujourd’hui, de nombreux processus restent encore papier, avec des étapes chronophages et sources d’erreurs. En digitalisant ces flux, on gagne en rapidité, en traçabilité et en capacité d’analyse.
L’autre bénéfice est la transparence : les données deviennent visibles et exploitables pour nourrir des démarches d’amélioration continue. Le laboratoire de demain ne sera plus seulement un organe de contrôle, mais un acteur central de la performance globale du site.
Selon vous, pourquoi les sites de production doivent-ils participer au Congrès Polepharma Industrie du Futur ?
Parce que c’est un congrès « fait par » et « pour » la filière (bio)pharmaceutique. On y retrouve la diversité de nos acteurs, des PME, ETI, jusqu’aux grands groupes, tous concernés par la digitalisation. Le contenu est ciblé, concret, mis en avant par des intervenants de qualité issus de notre industrie, et l’ensemble permet de créer des synergies. À cela s’ajoutent les stands fournisseurs, qui offrent une veille technologique précieuse et des opportunités de collaboration.
Quel message souhaitez-vous adresser à la filière ?
N’ayez pas peur de digitaliser, ni d’innover sur votre site. Commencez petit, avec des projets simples, et avancez par étapes. C’est la démarche que nous avons suivie à Chartres : d’abord digitaliser des formulaires et adopter des applications basiques, avant de passer à des projets plus ambitieux. Chaque palier crée de la valeur, renforce la confiance des équipes et installe une dynamique positive.
Pour les PME et ETI, souvent limitées en temps et en ressources, l’accompagnement est indispensable pour réussir cette transformation. C’est précisément là que le rôle de Polepharma prend toute son importance.
Comment Polepharma peut-il concrètement accompagner ces ambitions ?
Au-delà d’être un facilitateur, Polepharma agit comme un véritable catalyseur pour la filière. Il crée du lien entre industriels, sous-traitants, fournisseurs, écoles et organismes de formation, tout en favorisant le partage des bonnes pratiques. Sa fusion avec la SFSTP lui donne également davantage de poids pour influer sur l’évolution réglementaire, un enjeu clé pour accélérer la digitalisation.
Enfin, le Congrès Polepharma Industrie du Futur reste le temps fort annuel : un rendez-vous fédérateur et un accélérateur qui permet à la filière (bio)pharmaceutique de se projeter collectivement vers les défis de demain.
Propos recueillis par Marion Baschet Vernet
Contact :
Marie-Flore Barreau - Responsable Performance Industrielle
marie-flore.barreau@polepharma.com